Le Beau Rivage

[Visite en février 2012]

C’est à Champ-Bornes que nous nous sommes arrêtés aujourd’hui pour goûter à la cuisine de l’un des plus vieux restaurants de l’Est : Le Beau Rivage, pile en face de la mairie annexe, à côté des ruines de l’ancienne église. Au moment où nous écrivons ces lignes, le Beau Rivage ne porte pas bien son nom : il y a des travaux en cours sur le littoral, semble-t-il,  et le rivage ne ressemble à rien. L’intérieur du restaurant est décoré à la chinoise, un peu kitch, avec des chaises en plastique recouvertes de tissus. La salle est grande et climatisée.

Au milieu, trône une table à buffet, pour l’heure vide. L’accueil est sympathique et détendu. Nous nous plaçons près de la baie vitrée qui donne sur la mer. A la carte, des plats chinois et métros, et les grands classiques de la cuisine créole : du sempiternel rougail saucisse au cabri massalé en passant par le civet zourite et le cari bichiques. La seule entrée créole : une salade de palmiste. Pour une fois nous opterons donc pour des entrées chinoises : calamars frits pimentés et des nems au poulet. Suivront un rougail boucané, viande provenant d’un fameux charcutier de la région, et un cari de poisson rouge (local), servi pimenté, que nous espérons à la hauteur, vu son prix : 29 euros.

Avant d’entamer les hostilités, nous testons le cocktail “maison”, avec “la touche finale“ du barman…qui pique notre curiosité. Le breuvage est très sucré, mais assez léger en alcool, et on y détecte des saveurs de banane, d’ananas, et de menthe. La touche finale s’avérerait être la déco du cocktail… dixit le barman lui-même, mais on a du mal à le croire !

Les entrées arrivent. Les morceaux de calamar coupés finement ont frit avec une légère pellicule de pâte parfumée. Très intéressant en bouche puisqu’on a tour à tour le croquant-souple de la chair du calamar et le croustillant de la pâte d’une épaisseur moléculaire. Le tout fleure bon l’ail et le piment, sans exagération. Les nems, en revanche, sont parfaitement quelconques. Voire moins. Elles nous ont été servies un peu brûlées sur les coins, et le goût entêtant du chou écrase ceux des autres ingrédients. Par dessus le marché, ni feuilles de salade, ni menthe fraîche en accompagnement. Dommage.

Nous poursuivons par le boucané. La viande de chez le charcutier est ni trop sèche ni trop grasse, et cuite à point. La sauce du cari est peu abondante mais réalisée avec des bonnes tomates de chez nous, bien mûres, et pas celles qu’on trouve au rayon “tôles” des supermarchés. Etrangement, nous trouvons au boucané un arrière-goût de sarcives, mais sans que cela devienne désagréable. Une sauce de piment vert aux oignons vient relever un peu le plat. Les gros pois en crème complètent le tout avec bonheur.

Le poisson rouge, de 25 centimètres environ et servi entier, est assez correct. Sa carte d’identité arômatique, olfactive et sensorielle est conforme à ce que l’on est en droit d’attendre. La chair est tendre et fondante, et la sauce, légèrement gluante comme de juste, a capté la majeur partie des saveurs, particulièrement dans la tête. Cette dernière a fait l’objet de notre attention particulière. Nous l’avons dépecée avec soin, en suçant avec délectation les moindres morceaux, aussi piquant fussent-ils. Nous avons terminé par les joues, minuscules mais goûteuses, avec une pensée émue pour tous nos ami(e)s gourmets créoles qui font de la dégustation de la tête de poisson rouge une véritable cérémonie durant laquelle il ne faut surtout pas les déranger ! Le poisson est nettoyé mais, nonobstant la tête, nous déplorons tout de même un léger manque de punch gustatif. Il fallait bien chercher le piment, et nous aurions apprécié que le gingembre donne plus de voix, en duo avec du combava dont nous n’avons pas trouvé trace.

C’est l’heure du café, et de l’addition : 75 euros et des écailles de poisson pour deux personnes (apéritifs, entrées, plats et café). Un peu chaud quand même.

Le Beau rivage est toujours considéré comme une étape gastronomique incontournable de la côte est, en dépit de la nombreuse concurrence alentour et du site qui a grand besoin d’un sérieux lifting. La cuisine créole mériterait également d’y être davantage honorée, avec des plats sortant des ordinaires et communs caris et rougails. Pour autant, sans être vraiment sensationnels, les plats proposés sont d’honnête facture, et à la fin des repas vous repartirez assez satisfaits. Nous ajoutons par conséquent une petite fourchette en argent à la carte de visite du Beau Rivage. C’est la troisième depuis le début de l’année, pourvu que ça dure!

Pour résumer
Accueil : bien • Cadre : moyen • Plats : bons • Rapport qualité-prix : mauvais
Notre impression globale : bonne table
Fourchette en argent 

Note août 2013 : Un restaurant créole tendance cuisine chinoise.

La Table créole

[Visite en février 2012]

Aujourd’hui nous mettons les pieds sous « La table créole », au Port. Vous trouverez ce restaurant sur l’ancienne route nationale, un peu avant le temple tamoul dans la direction Possession – Rivière-des-Galets, niché dans le décor de savane typique du coin (galets-tamarins-soleil qui pwak). Une vaste salle ouverte taillée pour les dîners dansants nous accueille.

Le personnel est prévenant et nous propose un apétitif. La carte est au mur. Au menu du jour : rougail chevaquines, rougail morue, cuisse de poulet au four avec riz sauté, l’assortiment habituel des shop-suey (porc, bœuf, etc.) et quelques plats métros : entrecôte, magret de canard, rumsteak, salades. Ni une ni deux, nous salivons déjà pour le rougail chevaquines et son cousin le rougail morue et les commandons aussi sec. Comme nous sommes arrivés de bonne heure, nous patientons un peu le temps que le service se mette en place et que les autres clients arrivent. Des habitués, souvent, qui viennent chercher des plats à emporter (7 euros! Pas donnée la morue en barquette !), et des employés de la zone industrielle et commerciale voisine.

Les plats arrivent portés à bout de bras par la souriante serveuse à laquelle nous avons demandé un piment « crasé » pour aller avec les chevaquines. Un piment la pâte vert en tient lieu, on lui fera son affaire (au piment, pas à la serveuse !).

Les chevaquines ont une belle couleur marron, signe qu’elles ont été bien grillées comme il faut, et que la tomate a fondu et doré avec les petits morceaux de crevettes pilés dans les règles. Ces minuscules crevettes ont leurs amateurs et leurs détracteurs. Tout le monde n’aime pas. La faute, souvent, à une odeur assez forte et à leur goût prononcé. Le diable nous patafiole, mais ce qu’il y a dans nos assiettes n’a rien à voir avec cela. Le goût des chevaquines est toujours là, mais sage et domestiqué. De plus, elles ont été si bien pilées qu’en bouche aucune agression de gencive n’est à signaler. Un bonheur. Du coup, le riz teinté de la belle couleur de la sauce n’en est que plus goûteux.

Le fameux piment la pâte, bien musclé, accompagne tout cela à merveille en nous mettant une claque ou deux. Au passage, il dira bonjour aussi à la morue. Cette dernière est excellente. Et ce n’est pas évident de trouver du bon rougail morue par les temps qui courent. D’une belle couleur orangée, habillée de paillettes d’oignons verts, elle nous chante ses saveurs lointaines des souvenirs de ses ancêtres qui parfumaient les boutiques chinois d’antan. La sauce est parfaite, ni trop grasse, ni envahissante et salée juste ce qu’il faut. Un bémol : les morceaux sont un peu gros. On aurait préféré le poisson un peu plus émietté. Ceci dit, on peut comprendre celui ou celle qui s’en est occupé, on imagine : “MAAA fiiy ! Tout’ sa la morue-là pou éclitééé, moin na poin rienk’sa pou fé ! Et puis vi koné, la morue koméla, lé pu pareil sa d’avant !

On redemande du riz, pour finir les caris (un peu juste pour des travailleurs qui transpirent, la dose de riz, surtout avec des caris comme ceux-là). On nous débarrasse avec la question rituelle : “vous avez terminé ?” La table, qui ressemble à Dunkerque un 5 juin 1940, répond d’elle-même. Nous terminons effectivement par des douceurs, une crème brulée et un fondant tiramisu qui réconcilierait n’importe quel candidat au suicide avec la vie. L’addition (apéros-repas, desserts et cafés) se monte à 46 euros pour deux personnes. Bien. On ne regrette pas d’être venus.

“La Table créole” est un resto-midi qui propose de la bonne cuisine pour pas très cher et on y passe un bon moment. L’ambiance est conviviale, le personnel est disponible et très sympathique. Ceux qui travaillent aux alentours l’ont bien compris. Si vous êtes de passage pour affaire du côté du Port, n’hésitez pas. Un endroit idéal pour emmener un client et signer un contrat. Quelques points peut-être à améliorer : il y fait un peu chaud, des brumisateurs ne seraient pas du luxe. On aimerait aussi avoir une carte à table. Ceux qui sont assis loin ne peuvent pas forcément lire les tableaux. Nous décernons donc à la Table créole une magnifique fourchette en argent massif.

Pour résumer
Accueil : bien • Cadre : bien • Plats : bons / très bons • Rapport qualité/prix : correct
Notre impression globale : bonne table
Fourchette en argent 

 

Note août 2013 : L’un des établissements les plus sympas que nous ayons testé. Nous y sommes retournés de manière informelle un an plus tard, la qualité de la cuisine n’avait pas bougé.