Le Zamalak

[Visite en septembre 2012]

Aujourd’hui, arrêt dans la bourgade en expansion de Saint-Gilles-les-Hauts. Suite à nos navigations sur le web, nous avions découvert le Zamalak, établissement tenu par un dénommé Doki-Thonon. Le patronyme, connu dans le milieu des gastronomes péi, nous a fait dresser le sourcil gauche, celui qui veut dire « tiens, intéressant ! ».

Ça, et le fait que l’établissement soit crédité de commentaires élogieux par des internautes visiblement contents du voyage, a fait monter la pression dans notre jauge de curiosité, et, passez muscade, nous voilà déjà attablés au Zamalak, appréciant d’un œil humide l’antique sol ciré au rouge, à la brosse coco d’Ernestine, qui la jouait « Rock around the clock » sur les bords. Un peu à l’écart de la traversante du village, l’endroit est vaste. La salle étale pour l’heure une trentaine de couverts, très espacés, un bonheur pour les enrobés (dont nous sommes), et les familles aux enfants remuants (idem). Autant de places en terrasse, à côté du comptoir. Tout cela est pour le moins coloré. Le mélange de la tradition avec ce côté « snack de plage » donne au lieu une certaine personnalité, et l’on s’y sent bien. L’accueil est au diapason : courtois, sympathique, détendu. La carte affiche des salades, quelques plats d’inspiration métropolitaine et nos caris habituels, plus deux, que nous avons rarement vus jusqu’ici au menu des établissements que nous avons visités, et que nous nous faisons conséquemment un devoir de commander : un rôti de porc et une pintade à la vanille.

En guise d’apéritif, nous nous autorisons un ti’punch, avec la mère Modération qui ne nous quitte pas d’une semelle. Nous nous l’envoyons doucement derrière la cravate, et l’odeur sucrée du rhum citronné se mélange avec celle, ambiante, du bois de la case, nous catapultant dans un passé créole pas si lointain. Il ne manque plus que le père Dédé à la radio, avec un air des Jokarys ! Nostalgie quand tu nous tiens… Les salades, posées sur une table voisine sont conséquentes. Et nos assiettes ne le sont pas moins. Ce ne sont pas tout à fait des portions pour dockers, mais pas loin.

Riz, caris, nos bons vieux pois du Cap, parfaits pour la musique de chambre qui fera plaisir à madame, et trois rougails. Tout y est. Enfin… tout, non : toujours pas de brèdes à table mes enfants ! Un gros samedi forain à Saint-Paul, et avec un marchand de légumes à deux cent mètres de là, saperlipopette ! Il faudra un jour qu’on nous explique cet embargo quasi-général sur les brèdes dans nos restaurants ! Sont-ce les prix ? La conservation ? La demande insuffisante de la part des clients ? Nos colonnes sont ouvertes à qui voudra éclairer notre lanterne. Nous attaquons.

Avant de commencer, un point : nous ne courons pas derrière la pintade. D’abord parce que ça doit courir vite, ces machins-là, et surtout parce que la viande a un arrière-goût spécial qui ne nous sied guère, mais c’est très personnel ! Pourquoi donc le préciser ? Parce que la pintade s’est avérée sympathique. A l’aspect déjà, et surtout à l’odeur. Les effluves de sauce réduite, de caramel et de fumée de feu de bois entonnent un « alléluia » dans nos narines extasiées. Le palais est aussi satisfait : viande cuisinée à la perfection, pas trop sèche. Petit os imprégnés de sauce dont nous nous délectons lentement. Morceaux de gousses de vanille que nous croquons délicatement afin d’en extraire la fine pulpe et en mélanger la saveur avec celle, parcimonieusement sucrée, du cari. Flash-back. Ernestine, jupes retroussées dans la poussière de décembre, court derrière la pintade, grand couteau à la main.

Le charme retombe un peu avec le rôti. Il était bon, doré et tout, ce serait mentir de dire le contraire, mais sans attrait particulier. Pour le coup, nous avons trouvé qu’il manquait un peu de parfum, même le persil fané dessus était éteint. La viande, pas trop sèche et aux bords moelleux, était tout de même correcte, nous présentant sa petite amertume du fond de marmite. Une ou deux gousses d’ail piquées dedans auraient fait notre affaire.

Les rougails s’en sortent pas mal, le citron devant. Il s’est bien marié avec le sucré-salé de la pintade. Le rougail tomate était acceptable. Le rougail dakatine, lui, était fade. Bon point pour les pois en crème. Le riz était un tantinet collant. On aime ou pas, sans commentaire donc.

L’addition se monte à 28 euros pour deux plats et un apéritif. Un tarif très honnête, l’un des meilleurs rapports qualité-prix de cette rubrique. Voici donc une escale intéressante et pas chère, sur la route de l’Ouest et du Sud, au lieu de vous précipiter sur la route des Tamarins bille en tête à midi tapante. Quelques tournants et vous y êtes. L’occasion de faire une pause déjeuner sympa et conviviale. Le cadre est « roots » et ensoleillé. La cuisine y est perfectible mais déjà très correcte. Un effort serait peut-être à faire sur les accompagnements, mais pour le prix, il serait inconvenant d’être trop exigeant.

Le Jamalac est un de ces fruits rares et mal aimés qui ne s’apprécie vraiment qu’à complète maturité, quand sa couleur tutoie le rouge cramoisi, si bien entendu les oiseaux vous laissent quelque chose ! Question de maturité peut-être : ce ne sera pas la fourchette d’or cette fois-ci pour le Zamalac. Celle-ci demeure toutefois largement accessible, mais en attendant, c’est une bien belle fourchette en argent que nous décernons à ce resto-midi de Saint-Gilles-les-Hauts.

Pour résumer :
Accueil : bien • Cadre : très bien • Présentation des plats : perfectible
Service : bien • Qualité des plats : bons
Notre impression globale : Bonne table
Fourchette en argent

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