La Marmite du pêcheur

IMG_5077Direction Saint-Philippe aujourd’hui, patrie du pimpin, du vacoa, de la nature qui luxure entre le vert et le bleu, avec le noir du basalte entre les deux. Nous retournons à la Marmite du Pêcheur, adresse visitée en 2015, qui nous avait laissés sur notre faim malgré une fourchette en argent.

Cette fois-ci, nous débarquons en semaine. Pas âme qui vive à 11h30. Cela se remplira au fur et à mesure et l’agréable terrasse est prisée. Les lieux sont en tout point identiques à nos souvenirs : outre cette terrasse, une grande salle confortable bien qu’un peu froide. Le style général, tables comprises, est classieux sur les bords, sans ostentation. L’accueil est souriant et très professionnel. Au menu du jour : gratin de papaye ou assiette créole, cari de porc palmiste, cari de poulet ou cari de poisson du jour, puis une assiette de trois desserts avec café. Saint-Philippe étant aussi la patrie du palmiste, nous optons pour le cochon, plus l’assiette créole.

Un punch nous fait patienter. À vue de nez, du jus de fruit en brique avec du rhum. Il est suivi d’un amuse-bouche au saumon avec un petit beignet de bringelle.

IMG_5083L’assiette créole ouvre la séance. C’est un achard de légumes, accompagné d’un samoussa, d’un bonbon piment et d’un beignet de morue, décorés d’une feuille de salade fatiguée. Ces fritures sont relativement correctes, la farce du samoussa est molle. Le achard est coupé «gros doigts», ou plutôt au robot, et à part une acidité teintée d’amertume, pas grand-chose. Nous avons presque l’impression de manger du curcuma à la cuillère. Heureusement les légumes sont croquants, mais leur saveur est écrasée. Les émincés de gros piment sauvent l’honneur. Cela fait un bon moment que nous n’avons pas vu de bons achards de légumes au restaurant. Certains objecteront que sa préparation «comme avant» prend trop de temps.

IMG_5085Le cari de porc, à la vue déjà, ne fait pas envie, même présenté dans une petite marmite. Aucun semblant de décor pour donner de la couleur au plat. En bouche, c’est pire. À la mastication, les gros morceaux de chair, filandreux et secs, dégagent un arrière-goût de cochon brut, sans finesse. Un goût qu’on oublie assez vite puisque le cari est atomisé par un poivre dosé à la grosse Bertha. Lequel poivre a bien sûr phagocyté la saveur du palmiste qui, de toute façon, n’a visiblement pas eu le temps de boire le jus du cari, puisqu’il est dur sous la dent et filandreux aussi, Félicie. Il faudrait appeler ça un «cari de poivre au porc palmiste en filasses». Pour être tout à fait honnête.

Les grains sont trop salés et se sont accrochés au fond de la marmite vu la réminiscence cramée qui remugle. Le riz est passable. Le rougail tomate est lui aussi coupé gros, comme on le voit souvent, il faut croire que les restaurants de cuisine réunionnaise «de standing» ont oublié ce que c’est qu’un pilon. Résultat : le rougail est médiocre, d’autant que les tomates commencent à refouler cette saveur de maturation proche de la date limite. L’autre rougail, concombre, est standard.

IMG_5090Le café gourmand du dessert ne nous laissera pas non plus un souvenir impérissable. Ni les douceurs chocolatées, ni cette crème couchée de goyavier, quelconque. Pour ce menu sans relief, nous avons payé 20 euros. Le rapport qualité prix est mauvais.

Peut-être aurions-nous dû choisir le poisson. Un adage nous vient à l’esprit quand on regarde la salle, le standing plus ou moins affiché, et ce que nous avons eu dans notre assiette : «Qui trop embrasse, mal étreint». Et ce genre de cuisine «réunionnaise» n’étreint plus rien d’autre que les objectifs de rentabilité. C’est bâclé. C’est une injure à notre gastronomie authentique, dans un lieu qui se trouve en première ligne du tourisme. En l’espèce, et malheureusement, la Marmite du pêcheur ne fait pas exception en la matière, bien d’autres adresses touristiques sont du même moule, y compris les hôtels d’ailleurs. Jusqu’à preuve du contraire, en matière de cuisine locale, il n’y en a pas un pour racheter l’autre, à quelques rares exceptions près. C’est inadmissible. La Marmite du pêcheur serait bien inspirée de revenir à une cuisine plus goûteuse, plus respectueuse de nos traditions, quitte à changer de registre. Compte tenu de ce que ce restaurant représente dans le Sud Sauvage, nous ne pouvons qu’être sévères, en espérant qu’il s’agisse d’un incident. En conséquence, pas d’autre choix que de ficher une fourchette en plastique sur le menu de la Marmite du pêcheur, aujourd’hui.

FourchettesPour résumer. Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : moyen • Service : très bien • Qualité des plats : mauvais • Rapport qualité-prix : mauvais. Impression globale : insuffisant
Fourchette en plastique

LA PRÉSENTE CRITIQUE A ÉTÉ RÉALISÉE LE 10 NOVEMBRE 2017, À PARTIR DE MIDI, ET NE PRÉTEND PAS ÊTRE UNE VÉRITÉ ABSOLUE ET DÉFINITIVE. NOTRE POINT DE VUE EST SUBJECTIF, PAR NATURE, MAIS PARFAITEMENT HONNÊTE. NOUS CERTIFIONS N’AVOIR AUCUN RAPPORT DE PRÈS OU DE LOIN AVEC LES PROPRIÉTAIRES DE CE RESTAURANT ET AUCUN INTÉRÊT À ATTRIBUER À CE DERNIER UNE BONNE OU UNE MAUVAISE NOTE. DANS TOUS LES CAS, LE RESTAURANT DISPOSE D’UN DROIT DE RÉPONSE.

L’Eskal Gourman

IMG_1015L’été qui revient nous pousse aujourd’hui a emprunter les lacets de la Plaine-des-Palmistes pour prendre le frais et déjeuner. Nous avons visité la plupart des restaurants de ce joli village, depuis que cette rubrique existe.
La Ferme du Pommeau, Le Relais des Plaines, l’Escale des Calumets, Le Platane, Le Ti feuille Songe (aujourd’hui disparu) et dernièrement le Relais des Pitons, ont été passés à la moulinette, avec plus ou moins de bonheur. L’or n’a jamais été au rendez-vous.

IMG_1014Cette fois nous descendons à l’Eskal Gourman, à côté de la place du marché. Quelques tables à l’intérieur, une terrasse, et des bacs à caris. Ici c’est semi-self service et plateau. L’accueil est poli. Au menu : rôti de dindonneau, porc massalé aubergine (et pas « bringelles » ! ), civet zourite, poulet dakatine, rougail saucisses, tout ça accompagné au choix de riz blanc ou riz jaune au petit pois. Va pour le civet, le dindonneau et le rougail saucisses. Nous posons nos plateaux, nos séants, et attaquons.

IMG_1011Le civet zourite a une belle couleur, mais joue à la chambre à air : c’est caoutchouteux. Pas au point d’en être immangeable, encore heureux. Un petite cuisson un peu plus poussée ne lui aurait pas fait de mal. Côté épices, c’est mince. Le girofle est comme la sœur Anne, le poivre est timide, les humeurs de vin autistes. Ce civet là conviendra très bien aux délicats qui n’aiment pas les goûts trop prononcés, comme celui qu’un civet zourite civilisé a logiquement tendance à proposer.

IMG_1010Le dindonneau ferait presque mieux. La chair est peu sèche, mais fade, d’autant que le rôti est tout enrobé d’une sauce au poivre vert au tempérament affirmé. C’est mangeable, mais pas transcendant.

Le rougail saucisses est de la catégorie des standards de barquette. Les tranches fines délivrent une saveurs plutôt satisfaisante dans leur sauce rouge qui imbibe le riz. Mais là encore, nous avons largement vu mieux.

Dans cette morne plaine gustative où on s’emmerde à cent sous de l’heure, un petit rougail oignon-citron tire son épingle du jeu. C’est pimenté mais pas trop, et l’acidité parfumée de l’agrume s’est bien mariée avec celle de l’oignon. Cela réveille le zourite. Le riz est dans la même veine que les caris : banal. Même le riz jaune, curcumaté au camion tout-venant, sec, accompagne mal les caris.

Nous n’envisageons même pas de dessert, et réglons une note de 42,50 euros, boissons comprises, pour 3 pesonnes. Sachant qu’un repas sur place est facturé à partir de 12 euros (7, à emporter). Le rapport qualité-prix est limite.

L’Eskal Gourman affiche sans honte « spécialités au feu de bois ». Ah bon ? Réchauffé au feu de bois alors, parce que du fumet caractéristique du cari cuit au feu de bois : zéro. Ou sans doute n’avons nous pas eu droit aux « spécialités ». Car effectivement, ce repas n’a rien eu de spécial. L’Eskal Gourman est un camion bar moyen déguisé en restaurant. Des plats cuisiné par dessus la jambe, à l’économie, pour remplir les ventres. Pas pour ravir les palais. Le genre de plats qu’on a davantage l’habitude de voir en ville plutôt que dans la verdure des villages des hauts, où on s’attend à manger des bon caris, dussent-ils être préparés avec des produits standards.
Le service quant à lui est assez professionnel. Il n’y a pas grand chose d’autre à dire, sinon que l’Eskal Gourman a mérité sa fourchette en inox.

 

finoxPour résumer. Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats: Self • Service : bien • Qualité des plats : moyens • Rapport qualité-prix:  perfectible. Impression globale : insignifiant.
Fourchette en inox

LA PRÉSENTE CRITIQUE A ÉTÉ RÉALISÉE LE 4 NOVEMBRE 2017, À PARTIR DE MIDI, ET NE PRÉTEND PAS ÊTRE UNE VÉRITÉ ABSOLUE ET DÉFINITIVE. NOTRE POINT DE VUE EST SUBJECTIF, PAR NATURE, MAIS PARFAITEMENT HONNÊTE. NOUS CERTIFIONS N’AVOIR AUCUN RAPPORT DE PRÈS OU DE LOIN AVEC LES PROPRIÉTAIRES DE CE RESTAURANT ET AUCUN INTÉRÊT À ATTRIBUER À CE DERNIER UNE BONNE OU UNE MAUVAISE NOTE. DANS TOUS LES CAS, LE RESTAURANT DISPOSE D’UN DROIT DE RÉPONSE.

Un autre son de cloche

[Découverte]

IMG_4458Depuis une petite année, dans le quartier de la Délivrance, aux pieds de la magnifique église éponyme, résonne un Autre son de cloche. Non pas les matines, ni l’angélus, mon père, mais celui des cuisines de Jean-Noël, enfant du Bon Dieu et d’Épicure, qui, presque chaque jour que l’Éternel fait, gratifie sa clientèle de ses petits plats arrangés avec amour, selon son inspiration et les produits frais offerts par notre belle nature.

IMG_4460 okTrois entrées, trois plats et trois desserts autorisent de multiples combinaisons, et si vous voulez vous faire la totale, entrée, plat et dessert, il vous en coûtera 28 euros, plus la monnaie pour la quête.
Une gourmandise qu’il ne faut pas confondre avec gloutonnerie. La première est signe que vous aimez les bonnes choses, la seconde que vous avez un palais en galva associé à une panse sans fond. Chez l’abbé Jean-Noël, l’on entretien la première sans vous encourager à la seconde. Chaque plat est dosé, dressé avec soin, et malgré les apparences, vous sortez repus, la conscience tranquille, la vésicule joyeuse. Arrosé d’un bon petit vin que vous conseille le patron, ce repas se digère comme le petit Jésus pour un nouveau communiant.
Aujourd’hui nous dégustons des crevettes sauce tartare pommes vertes et fenouil, une entrecôte, jus et condiments et un pain perdu, fraises et crème fouettée.

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IMG_4473 okUne entrée de crevettes tout en jeu de sensations. La sauce tartare donnant de l’épaisseur et relevant les crustacés qu’on a cru se tasser. La pomme verte et le fenouil apportent du croquant et une fraîcheur anisée qui habille bien les bestioles.
L’entrecôte demandée saignante est conforme à nos souhaits. Elle est tendre -la vache- persillée, picote sur les entournures, rince les petits légumes de son jus magnifique de viande rouge, brut et non brutal, et sa purée de patate fraîche veloutée, que nous terminons lentement pour faire le deuil de la viande désormais disparue. Peine perdue. Et pain perdu. Place au dessert.
Quelle chanteuse célèbre adore le pain perdu ? Hélène Ségara. Si vous n’avez pas compris tout de suite, vous rirez la semaine prochaine.

Le notre a ramené sa fraise, puis filé comme un mirage, mie imbibée, croûte aussi, crème fouettée, dessert béni. Cela s’appelle se prendre un pain. Cette douceur de l’enfance, goûter d’hiver quand brouillard i marche kat’pat. Mais l’été pointe, lentement. Et c’est le soleil qui brille sur les menus de l’Autre son de cloche.

Mais Jean-Noël veut rester discret. Pas de pub. Donc rappelez-vous : vous ne lisez pas cet article, vous n’irez pas acheté le journal, nous n’avons pas été manger ce délicieux repas, qui n’existe pas. Vous ne vous précipiterez pas là-bas ventre à terre, pour entendre ce very « bel » bell. Et passer cette porte du paradis des gourmets. God bless cette adresse.


26 Place de la Délivrance – Petite-île, Saint-Denis
0692 97 23 33