L’Alizé, pouponnière culinaire à Plateau-Caillou

Cuisinier, serveur, barman, maître d’hôtel, chef de partie, etc. : des savoirs-faire et des compétences, qui peuvent aller jusqu’à l’expertise fine, dans chacun de ces métiers enseignés au Lycée de la Renaissance. Petite visite impromptue de son restaurant d’application qui a vu défiler bon nombre de nos chefs locaux, et des plus talentueux.

IMG_9211Les « petits » que vous rencontrez quand vous réservez une table au restaurant d’application du lycée de la Renaissance peuvent vous dire que ces métiers ne sont pas faciles. Et s’ils ne vous le disent pas verbalement, leur comportement le fait. Nous avons pu le constater par nous-même, en allant musarder du côté de Plateau-caillou à Saint-Paul.
Pour manger au restaurant d’application, la réservation est obligatoire. On le comprend aisément : les élèves n’ont pas que cela à faire, à 14h00, ils reprennent les cours. On vous prie donc d’arriver à 12h15 pétantes, pour être accueillis par l’équipe du service. L’autre équipe est derrière, en cuisine. Elle expérimente déjà les gueulantes légendaires des chefs de la « vraie » vie, lors des coups de feu. On vous demandera donc un peu d’indulgence pour les éventuelles hésitations, les menus bredouillés, les sourires crispés encore tout à fait normaux pour ces adolescents. Mais vous constaterez aussi qu’ils sont de bonne volonté. On ne peut pas dire autant dans certains restaurants où le personnel a déjà de la bouteille.
En ce qui nous concerne nous sommes accueillis avec le sourire, puis placés. Et on nous tire la chaise, s’il vous plaît ! Nous nous installons. Le jeune fille en charge de notre table nous récite le menu du jour. Un menu conçu à l’avance, pour plusieurs semaines, que vous trouverez en ligne. Celui-ci est susceptible de changer sans préavis, en fonction de la disponibilité des produits. Dans ce cas, vous aurez la surprise. La salle est vaste, confortable et un brin classieuse. 32 couverts bien espacés autorise des déambulations plus aisées des élèves serveurs.
Aujourd’hui nous avons droit à une salade landaise, un dos d’ombrine doré, beurre blanc au gingembre, mousseline de songe ; le repas est clos avec des profiteroles.

Service en rodage, cuisine déjà lumineuse

Les apéritifs tardent à arriver, alors que certaines tables sont déjà servies. Premier couac. Problème de communication entre la serveuse et le bar, une fiche égarée ou zappée, et hop… nos gosiers demeurent secs. L’une des élèves remarque notre attente et vient aux nouvelles. Bon réflexe. Les cocktails finissent par arriver, avec la jeune serveuse qui se justifie. Non mademoiselle, le lavage de linge sale se fait toujours en famille, les clients n’ont pas à être tenus au courant des atermoiements au bar ou en cuisine ! On fait patienter, on offre son plus beau sourire, même si on est stressée par la situation ! Les plats suivent sans anicroche.

IMG_9216La salade, très fraîche, constituée de différentes pousses, est très bien assaisonnée. Pas d’acidité agressive ni de sel surnuméraire. Les morceaux de magret et d’abats descendent tout seuls, avec les grâces onctueuses du foie gras et de l’oeuf poché-coulant. C’est efficace.

IMG_9226IMG_9224L’ombrine est magnifique. Sa peau offre un léger croustillant-collant du plus bel effet. La chair dégage céans, une belle saveur d’océan, par des réminiscences olfactives très nettes et une ampleur en bouche tout à fait mise en relief par une cuisson maîtrisée. C’est fondant. Les petites purées colorées complètent parfaitement la texture du poisson en amenant du velouté. Le beurre au gingembre emballe tout cela pour de bonne sensations gustatives, qui appellent aussi l’essuyage au pain.

IMG_9230Les profiteroles, gourmandes, terminent le repas avec leur douceur glacée, calmant subtilement les papilles excitées.
Le chef du jour et son adjoint passent de table en table afin de s’enquérir des impressions diverses. Ils ont du prendre une bonne inflammation des chevilles en retournant en cours, après les compliments recueillis. Bien sûr, personne ne va leur dire que c’était médiocre… parce que cela eût été mentir ! Pas de cirage de pompes, nous avons très bien mangé au restaurant d’application.
Dire que mûrissent là de futurs talents qui vont enchanter les palais à La Réunion, comme en métropole, en Europe, ou ailleurs ! Ces ados là en veulent. Et les professeurs, comme Patrick Gron-din et Pascal Lebon, veillent au grain. Allez au restaurant du lycée de la Renaissance. C’est une expérience gustative et humaine que vous ne regretterez pas.

 

Pour réserver :
reservations-lph@ac-reunion.fr Pour tout renseignement :
0693 00 96 02 (Uniquement le lundi, mardi, jeudi et vendredi)
Les menus
http://lycee-larenaissance.ac-reunion.fr/nos-menus/

Le restaurant est ouvert du lundi au vendredi, à déjeuner et à dîner (sauf mercredi et vendredi soir), fermé lors des différentes périodes de formation professionnelle.

Le Ti’Resto Lontan

Aujourd’hui nous grimpons à Bourg-Murat pour une mise à jour de fourchette. En effet, la fourchette d’or du Ti Resto Lontan est déjà vieille de six ans.

Nous débarquons de bonne heure comme à l’accoutumée, et l’on nous accueille avec le sourire. Nous nous posons à une table préalablement réservée et l’on nous apporte la carte sous sa forme originale propre à l’établissement : dans un vanne, qui était plus «artisanal» (et plus authentique) auparavant. Les lieux sont aussi propres et bien ordonnés que dans nos souvenirs, nonobstant le fait que les orchidées sont remplacées par une petite plante, type Chlorophytum elatum, dont certaines manquent d’un peu d’entretien.

IMG_9168La carte est toujours aux couleurs locales, avec quelques plats originaux tout de même, dont un poulet au miel et au citron, qui attire notre curiosité. Dans le registre des plats moins courants, nous notons aussi la présence d’une salade de foie de volaille à la crème, d’un gratin de songe, d’un millefeuille d’espadon aux brèdes sauce crème gingembre et des camarons crème vanille, combava ou porto. La tripotée locale classique des divers caris et rougail sont au nombre de treize, pas moins. Nous y piochons le rougail zandouille.

Si l’on compte les grillades, les entrées, le tutti et le quanti, le «vanne-carte» présente une quarantaine de plats différents. Quarante ! Une réflexion nous vient : Il y a encore des brontosaures qui s’imaginent qu’en ratissant large ils vont satisfaire tout le monde, avec l’illusion de pouvoir garder la qualité, même s’il y a la quantité. Il y a encore des restaurateurs qui font de leur établissement des usines à bouffe.
Le service est en tout cas efficace, agréable et professionnel. Testons donc.

IMG_9176Le poulet au miel et au citron est intéressant. Les émincés de poulet, coupés peut-être un peu épais, baignent dans une sauce crémeuse douce et acidulée,
veloutée, tout en finesse. Le miel et le citron se répondent en parfait équilibre. Quand l’un avance sa saveur boisée et profonde, l’autre donne son éclat frais d’agrume. Dommage que la plupart des morceaux de viande aient la consistance du carton pâte sur les bords, mais la sauce les aide bien à descendre.
IMG_9173Le rougail zandouille est présenté dans l’assiette comme du vomi. Il affiche en effet un aspect flasque et prédigéré peu engageant. Evidemment, quand on a quarante plats à la carte, sans une armée pour les cuisiner, on surgèle la plupart, et quand on réchauffe, cela peut donner cette chose. Et si encore l’andouille n’était que vilaine, on aurait pu pardonner. Mais elle aussi totalement exsangue de goût, ce qui est un comble tout de même pour cette charcutaille, qui, généralement, envoie du lourd. Celle-ci a été bouillie et rebouillie, on peut l’attaquer à la paille. Un plat d’hôpital. A 19 euros, oui m’sieur-dame. Nous réalisons soudain que la véritable andouille n’est peut-être pas celle qui gît dans l’assiette.

Un mot sur les à-côtés. Le riz, jaune ou blanc, est insignifiant en consistance comme en goût. Les grains, c’est encore pis. Pas une once d’épice, pas un grain de sel. Comme s’ils avaient été juste cuits à l’eau, et puis c’est tout. La (toute) petite fricassée de brèdes qui fait de la figuration a un goût de renfermé. Aucun intérêt. Seul le rougail de courgettes sauve un peu l’honneur.
Juste un mot sur le menu enfant, à douze euros. Douze, pour quelques frites navrantes et une saucisse. Là, on frise l’escroquerie. Heureusement, un supplément de frites est offert, ce qui n’explique en aucun cas le tarif.

IMG_9187Des beignets de bananes fort joliment présentés, très bons, croustillants dehors, tendres et chauds dedans, et leur chocolat fondu, viennent tempérer notre humeur jusqu’à ce que nous réglions l’addition : plus de 72 euros pour trois repas, apéritif et cafés compris. Le rapport qualité prix est mauvais.

Force est de constater que le Ti’ Resto Lontan nous a déçu aujourd’hui. La stratégie des cartes pléthoriques n’est pas celle qui mettra en valeur nos produits locaux dans une cuisine de qualité. Tout cela pourquoi ? Pour offrir du choix ? A quoi bon le choix si les plats doivent en pâtir. Ou alors cela devient du business. Au feu de bois, mais du business quand même, et cela est inacceptable.
Honte à la cuisine-business. Honte aux caris et rougails médiocres qui ne satisfont plus que les clients sans palais formatés à la mal-bouffe industrielle, ou les touristes  qui ne connaissent pas la vraie gastronomie réunionnaise. C’est d’autant plus dommage ici que le Ti’ Resto Lontan, avec ses plats originaux, pourrait aisément se positionner différemment par rapport aux autres établissements alentours, en proposant, en sus de deux ou trois caris classiques correctement réalisés, une cuisine locale nouvelle pleine de saveur et d’éclat. Du gâchis. Six ans après, la fourchette d’or s’est changée en fourchette en inox.

 

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Finox

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Pour résumer. Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : moyen
• Service : très bien • Qualité des plats : moyen
• Rapport qualité-prix : mauvais
Impression globale : décevant

Fourchette en inox