Nous débarquons aujourd’hui dans un de ces petits restaurants de quartier, où l’on a souvent d’heureuses surprises, sur la route montant à la clinique Saint-Clotilde. « Le Néflier » est son nom. Nous espérons ne pas y aller pour des Nèfles.
L’endroit est sympathique, au fond d’une allée très fleurie, et vous fait oublier la route fréquentée où trouver une place pour se garer est impossible. Pour ce faire, vous pouvez tenter la ZAC Finette, en contre-bas. Près de cinquante couverts, dehors et dedans. Un dedans très ouvert remarquez, avec vue sur un petit jardin. Nous sommes accueillis par un barbu aux atours de patron pêcheur, casquette sur la tête, sourire franc du collier et gouaille portée sur le ballon rond, et une dame de tempérament au service des barquettes derrière son comptoir, où quelques fins de salade sont exposés.
Il nous prie de nous installer, s’enquiert de nos choix, et nous rapporte les assiettes dressées séance tenante. Nous testerons le cari de grenadier, le civet de cerf et l’agneau au menu du jour, qui côtoient un « boucané aubergine », ici on dit « bringelles », des cuisses de poulet aux oignons et un agneau au curry, cousin métrosexuel putatif de notre cabri massalé. Les assiettes ont un semblant de présentation, voyons si le ramage se rapporte au plumage.
Le civet de cerf n’est pas mauvais. La viande ne fait pas mystère de son ADN de gibier en dégageant son caractère musqué, même si ce dernier a été assagi par un vin qui laisse sur les entournures quelques acidités non dérangeantes. C’est cuit fondant, et la sauce donne du liant à un riz en grain, qui renâcle à s’en imbiber. Mais si la viande est archi-cuite, elle manque tout de même de rondeur. Globalement, ce n’est pas très fin.
Le cari de grenadier ne voltige pas non plus dans les hauteurs gustatives, fut-il assaisonné au gingembre mangue comme croit bon nous préciser le patron. Sa chair en équilibre instable entre la finesse poissonnière et la sécheresse, a quand même le mérite d’être correctement cuite, pour ne pas gâcher le produit. La sauce, gingembre mangue ou pas, reste cependant superficielle, et a du mal à pénétrer le poisson, comme le riz d’ailleurs, pour les mêmes raisons mentionnées plus haut. Elle propose une humeur correcte, enrobée de douceur, mais sans casser des briques.
L’agneau au curry est sucré. Il affiche une parenté plus proche avec la gastronomie maghrébine que celle des indianités auxquelles nous sommes accoutumés par chez nous. Nous y décelons d’ailleurs ce qui ressemble fort à des raisins secs. Pour tout dire, c’est gras, très fort en goût et le côté sucré est écœurant. Si curry il y a là-dedans, il est atomisé.
Nous avons déjà parlé du riz. Les lentilles sont relativement bien apprêtées. Le rougail tomate est misérable. Encore un de ces rougails hachés gros doigts, plus proches de la salade de tomate fadasse que du bon rougail au pilon. Notons la présence louable de brèdes chouchou, pas mauvaises mais définitivement trop cuites à notre goût, et passablement mal triées. Des fils subsitent ici et là.
En dessert, on nous propose quelques pâtisseries maison. Nous optons pour un « gâteau de crêpes au chocolat », qui « manque d’un peu de froid » de l’aveu même du patron. C’est effectivement mou, mais se mange sans faim pour qui aime le chocolat en bonne quantité. Une petite chantilly eut été bienvenue, pour donner une touche aérienne à ce pavé gourmand.
Nous prenons congé en réglant une adition de plus de 40 euros, pour une boisson, trois repas (dont un à emporter) et un dessert. Le plat est à 14 euros ! Eu égard à la qualité globale, c’est cher.
Le Néflier semble tourner avec sa petite clientèle d’habitués, au creux de Sainte-Clotilde, sans se poser de question. Le cadre est agréable, l’accueil et le service sympathiques, mais la cuisine est assez moyenne. Nous n’attendions pas forcément un feu d’artifice gustatif dans l’assiette, mais au moins un minimum syndical que n’autorise sans doute pas des produits bas de gamme et surgelés, préparés avec une routine handicapante. Une impression nette de laisser aller et de désinvolture… qui va jusqu’à la propreté de la table : des couverts vieillissants et tâchés, des sets de tables sales, et le tutoiement de la dame au moment de payer alors que nous n’avons pas gardé les cabris massalés ensemble.
Sans être une mauvaise adresse (il y a sans doute de meilleurs jours, souhaitons le) le Néflier, aujourd’hui en tout cas, ne nous a pas motivé à sortir ne serait-ce qu’une brave fourchette en argent. L’inox tombe donc logiquement.
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Pour résumer. Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : moyen
• Service : très bien • Qualité des plats : moyen
• Rapport qualité-prix : mauvais. Impression globale : décevant