Aujourd’hui, nous voilà chez Doudou, route du Maïdo, adresse que nous avons visitée en 2012. Une mise à jour de fourchette s’impose.
Si l’extérieur est resté à peu près identique, la salle est beaucoup mieux aménagée et décorée que dans nos souvenirs. L’ambiance chalet est propice à la détente et quelques produits artisanaux proposés à la vente raviront les touristes.
La maison a choisi le buffet à volonté comme mode de fonctionnement, avec boissons, amuses bouches et dessert compris pour 23 euros. Dans les bacs : un cari de poulet, un civet de canard, un rougail saucisses-andouillettes-boucané, un cari de poisson, des grains, une daube de chouchou. Présentés à part, et assez joliment, quatre rougails : concombre, baba-figue, chouchou et bringelles. L’accueil est poli. Nous sommes placés, et l’on vient prendre la commande des boissons. Un jus de goyavier et un punch maison bien frais mettent nos papilles au garde-à-vous.
L’assiette d’amuses-bouche ne tarde pas. Quelques beignets de bringelles et de songe et des bouchons frits côtoient des chips de patate douce, accompagnée d’une succulente sauce épaisse, douce-acide et pimentée. Cette entrée en matière étant engageante, nous fonçons vers les caris avec confiance.
Le cari de poulet est assez standard. Un peu blême aussi. Les morceaux de viande ont tout de même de la tenue, et ne sont pas secs. La sauce imbibe l’affaire correctement et le mélange avec le riz, quoiqu’un peu huileux, produit les effets escomptés. Le goût est au rendez-vous.
Les charcutailles en rougail font mieux. Les morceaux de boucané coupés assez gros procurent une mâche gourmande, où le sel est un peu prétentieux, sans être vraiment dérangeant. A vrai dire il relève bien l’ensemble. Les saucisses sont moulues finement, elles dégagent un beau fumet quand la peau frite craque sous la dent. La sauce bien rouge est goûteuse colore le riz, et incite à se relever pour aller chercher des tranches de saucisse supplémentaires.
Le civet de canard est trop timide. Il frise même le black-out gustatif. La couleur est d’ailleurs assez pâle, pour un civet. Pénurie de gros rouge ? Girofle éventé ? Poivre confidentiel ? Pas assez roussi ? Un peu de tout cela peut-être. Un civet qui ne casse pas trois pattes à un canard.
Le poisson est pire. Les filets, du congelé sans aucun doute, durs sous la dent, baignent dans une sauce tomate trop salée, dont le persil pourtant joyeux peine à masquer la médiocrité. Le poisson lui-même est fadasse. Autant jeter des bouts de carton dans de la sauce tomate en boite avec du sel, on ne verrait même pas la différence. Si c’est là l’unique plat pour les clients qui ne mangent pas de viande, la déception est au rendez-vous.
Les (vieux) chouchous sont passables, si l’on fait abstraction du bombardement au poivre. Le riz fait son travail, les grains affichent un petit fumet plaisant. Mention spéciale pour les rougails : ils sont tous très bons, avec la dose de piment programmée pour les palais délicats. Le baba-figue délivre une petite amertume contenue, très agréable. Le rougail chouchou, finement râpé, est légèrement croquant, et très frais. Le rougail bringelle, dans le même esprit, aligne son onctuosité parfumée.
Au dessert : crème brûlée au géranium et tarte aux goyaviers meringuée. La crème est tout à fait délicieuse, et son humeur de géranium est pour le palais un baume de plaisir. La tarte est assez bonne, sucrée, mais la meringue est molle. Un succulent petit rhum arrangé au café met un point final au repas.
Addition : 46 euros pour deux personnes. Le rapport qualité prix est globalement assez bon.
Elle est loin, l’improbable tambouille à laquelle nous avons eu droit en 2012 chez Doudou. Les choses ont évolué, mais des progrès sont encore à faire. Nous avons apprécié l’offre des rougails, les amuses-bouches et deux caris. Deux autres étaient pitoyables. Quand on se retrouve en tête des adresses culinaires du patelin, avec des touristes qui débarquent, on fait tout pour que la totalité des caris soient bons. Pas besoin de faire du poisson, si c’est pour proposer ces filets congelés, à l’instar des infâmes pangasius, leurs frères ou leurs cousins, dans une sauce tomate salée. Céder aux sirènes du profit au détriment de la recherche de la qualité n’est pas rendre service à notre tradition, et c’est aussi mépriser nos touristes. Surtout quand on revendique cette tradition lontan sur un panneau du parking !
Deux couacs qui ternissent quelque peu l’ensemble de la prestation, mais ne nous empêchent pas de constater une nette amélioration globale par rapport à notre précédente visite.
La fourchette en inox est évitée de très peu.
____________________
Pour résumer. Accueil : bien • Cadre : bien • Présentation des plats : buffet
• Service : très bien • Qualité des plats : acceptable • Rapport qualité-prix : bien. Impression globale : bonne table
Fourchette en argent
____________________
Les mécontents ont l’art de cultiver la mauvaise foi, ou une forme d’autisme. Les réactions suite à la parution de la critique de chez Doudou ont été assez violentes, alors même que l’article ne comportait pas que des remarques négatives, mais également des appréciations positives. Seulement pour les gens de mauvaise foi, il est plus facile de faire des raccourcis dans le sens qui les arrange, apte à alimenter leur venin.
Et les mêmes rengaines reprennent, dont celle qui consiste à mettre en doute notre capacité à juger, étant non professionnel de la cuisine. Depuis quand les restaurateurs exigent-ils des clients de produire un CV pour avoir le droit d’émettre une opinion ? Et puis quoi encore ?
Attention bonnes gens, si vous postez un avis sur TripAdvisor, assurez-vous d’abord d’avoir au moins un CAP en cuisine, sinon honte à vous, et ce même si, en tant que Réunionnais, vous avez une bonne capacité à apprécier la tradition culinaire réunionnaise !
La deuxième rengaine : « les critiques ne servent qu’à casser les restaurants». Remarque teintée de paranoïa, très tendance sur les réseaux sociaux. Allez donc dire ça à Alix Clain, (Vieux Kréole, Saint-Denis, fourchette d’or), Fred Barret (Chez Ti Fred, Petite-île, fourchette d’or), ou plus récemment, au chef de chez Jo (Saint-Joseph, fourchette d’or) ou au jeune sidney de chez Moustache (fourchette d’or). Allez dire ça les yeux dans les yeux à David Banon (Reflet des îles, fourchette d’or).
Dès lors qu’on ouvre un restaurant, donc une activité commerciale, on s’expose aux critiques, cela fait partie du jeu. Ou alors il faut faire un autre métier. La critique culinaire aussi peut être critiquée (personne n’est infaillible) à condition de fournir des arguments valables, sinon, ce n’est plus de la critique, mais de la calomnie.
J’aimeJ’aime