Les petits artisans doivent diversifier leur offre pour espérer s’en sortir. Fort heureusement, la passion de leur métier les anime toujours, c’est le cas d’Elise Thomas, apicultrice et créatrice de achards, que nous avons rencontré.

Elise Thomas est originaire de Bellemène, tout comme son mari. Elle a l’âge de celles et ceux qui ont connu les années où La Réunion produisait encore du géranium, pour son huile essentielle. Ses propres parents le cultivaient, ainsi que la canne, pour nourrir une famille de 10 enfants dont elle est l’avant-dernière. Le travail, elle sait ce que c’est, surtout quand il a fallu aider sa mère veuve. “Aujourd’hui le géranium a été remplacé par des pâturages et des élevages de poulets” constate-t-elle avec une pointe de nostalgie.
Avec son mari, qui a pour ainsi dire grandi au milieu les abeilles, Elise exploite une cinquantaine de ruches sur la petite parcelle de Bell emène Canot, qui leur donnent miels de baies roses, de forêt ou de toutes fleurs selon les saisons, quand le varroa ne vient pas dévaster les essaims. En complément, leur terre leur fournit quelques légumes et matières premières à transformer. Parfois, les recettes sont délicates à ajuster, comme la confiture de pamplemousse dont elle a mis du temps à équilibrer le sucre et atténuer l’amertume naturelle. D’autres sont réalisées en fonction des légumes et condiments qu’elle trouve à bon prix, s’ils ne poussent pas sur le terrain. Sa nouvelle création : le achard de bambou, dont elle va chercher les pousses à proximité de chez elle, une recette inspirée par une connaissance thaïlandaise.

“Je n’aime pas les achards, je n’en mange pas, mais je sais les faire” s’amuse-t-elle. “Tout le monde me dit qu’il est meilleur que l’achard de palmiste.” Un sentiment que nous partageons, pour y avoir goûté. Rien d’étonnant à priori quand on connaît la fragilité gustative du palmiste, qui ne conserve toutes ses saveurs que peu de temps après avoir été coupé. “Je mets peu de piment pour que tout le monde puisse en manger” ajoute-t-elle, en suggérant des idées d’accompagnement, comme les toasts, avec ou sans pâté, ou le poisson. Le piment orange et le piment citron ont aussi leur petit succès auprès des consommateurs, les différents sirops et vinaigres parfumés et la poudre de combava également. Mais ce qui rassemble du monde sur le stand, ce sont les gâteaux péi qu’Elise réalise avec amour : manioc, patate, ti-son et pâté créole, bonbon millet, se vendent comme des petits pains. L’agricultrice a même eu les honneurs de Réunion la 1ère grâce à ses douceurs.

Elise se donne entièrement à son activité, même si les circonstances ne sont pas favorables. “Depuis que les touristes ne sont plus là, on a du mal à écouler certains produits, déplore-t-elle. Même en fin d’année c’était difficile, autrement tous les ans, c’est une période où l’activité augmente.” Sur les stands du “Marché Péi” au jardin de l’Etat, au marché du Théâtre de Saint-Gilles et à celui de l’Ermitage, seuls les habitués achètent régulièrement, et se font parfois ambassadeurs auprès de leurs connaissances. Comme ses confrères artisans, Elise attend que la situation s’améliore et compte sur Christian, un de ses trois garçons, pour reprendre l’activité. Menuisier de métier, il ne trouve plus assez de travail pour en vivre décemment. Pas d’inquiétude à avoir : il a déjà le bagou pour vendre la production familiale, et Elise ne sera jamais très loin.
Elise Thomas : 0692 58 48 41

