Un bon départ pour O’ Tipikement Kreol

O Tipikement Kréol est nouveau sur Hell-Bourg. Nous l’avions repéré voici quelques temps, surplombant les deux tournants garnis de platanes juste avant d’arriver au village de Hell-Bourg. L’accès se fait par le premier carrefour un peu plus haut.

Un vaste espace vert jouxte de bâtiment sur pilotis en pierres. La salle et la terrasse, aménagée de mobilier d’extérieur et de parasols jaunes, peuvent accueillir une bonne soixantaine de personnes au total. Nous arrivons les premiers, bien accueillis, et choisissons une table à l’extérieur pour profiter du beau temps. La serveuse nous ramène les panneaux où sont inscrits les boissons et le menu du jour. Un caloupilé qui est devenu caloupillée… Si on commence à piller les calous maintenant, où va-t-on ?

Un gratin de chouchou et palmiste frais en entrée, quatre plats principaux au choix : cari daurade au caloupilé (donc), un sauté de poulet chouchou et brèdes, un rougail saucisses et un riz chauffé au curcuma, porc ou végé. Salade frite et poulet croustillant ou gratin de chouchou ferment la marche. Nous prenons la formule du jour, entrée, plat, dessert et café à 25 euros. Un excellent cocktail de fruit frais légèrement alcoolisé nous désaltère. Mais la paille est trop petite pour la hauteur du verre. Dans ces cas-là, autant ne pas proposer de paille du tout.

Le gratin nous met bien. Si la sauce paraît un peu plus fluide qu’attendue, elle enrobe tout de même les morceaux de chouchous et de palmistes, dont le croquant préservé a le dont de mettre leur goût respectif à l’honneur. Bémol : le palmiste aurait peut-être mérité un peu de cuisson supplémentaire, certains morceaux montrent qu’ils existent, comme chantait France. Le fromage joue son rôle et fouette tout ça. Le gratin est vite fini.

Le sauté de poulet est satisfaisant, même s’il baigne un peu dans une sauce claire. Le chouchou, c’est beaucoup d’eau. Pour autant, les tranches de légumes n’ont pas trop souffert de cette humidité gustativement parlant, pas plus que les carottes. Et les (rares) brèdes non plus d’ailleurs. Quand on prend la peine de baptiser un plat avec le nom d’un ingrédient, la moindre des choses est de faire en sorte que ce dernier soit visible, et pas à l’état de molécule. Le poulet lui-même a du goût, dont le ton est clairement asiatique. L’ensemble se mange sans effort ni grimace, et se digère tout seul.

Nous attendons le rougail saucisse au tournant, sachant que notre expérience passée dans d’autres établissements a été rarement concluante, pour cause de saucisses exécrables. Celles-ci sont très bonnes. Des saucisses battues, visiblement, vu la mâche qui n’est pas molle pour les molaires. L’assaisonnement est équilibré, avec des sel et poivre maîtrisés et une jolie saveur de cochon qui ne s’en dédit pas. Renseignement pris, les saucisses proviennent du charcutier du centre du village, qui a l’heur de fournir d’autres établissements du coin. Quand c’est bon, c’est bon ! En voilà un qui sera visité pour le prochain concours de la saucisse d’or. Le rougail est conséquemment savoureux, avec une sauce tomate odorante relevée par les oignons verts.

Le riz est bien cuit, même si les grains sont un peu indisciplinés. Le petit hachard en accompagnement est très bon. Il va mieux avec les saucisses qu’avec le sauté d’ailleurs.

Deux desserts viennent terminer le repas sur une note de plaisir. Glace artisanale, vanille ou goyavier, ou bien une coupe de fruits frais où nous avons le bonheur de voir deux letchis, un demi fruit de la passion et de la mangue josée. C’est si rare de voir des fruits de saison dans les restaurants créoles que cela mérite un bon point.

Bilan de l’opération, une soixantaine d’euros pour deux personnes tout compris, soit trente par tête. Le rapport qualité prix est acceptable.

Si le restaurant O Tipikement Kréol est nouveau, son chef n’est pas un bleu. Billy Benoit a en effet fait chanter les marmites dans le gîte Le Tableau d’Hell-Bourg. Nos premières impressions sont clairement bonnes, mis à part quelques détails aisément corrigeables, et qu’on imputera à la période de « rodage » de l’établissement. Le chef en a encore sous la pédale, et il a tous les atouts pour surprendre son monde. Le cadre offre déjà un avantage que les restaurants du village n’ont pas : un espace verdoyant où l’on peut se garer aisément, même si des aménagements donneraient plus de cachet au lieu. Billy a devant lui un boulevard, car aucun restaurant du village ne sort pour l’instant du lot. Ils oscillent entre le très moyen et le bon sans éclat. Courir à la facilité en proposant aux touristes ignorants de notre cuisine créole traditionnelle des plats réalisés à la va-vite avec des produits bas de gamme est peut-être un bon calcul économique, mais la destination finale reste la médiocrité et la perte progressive du goût. Les remontées de nos antennes au sujet d’établissements jadis bien notés ne sont pas bons. O’Tipikement Kréol, à vous de jouer !

Le Pti Koin Kreol, une cuisine assez honnête, et des aléas

Aujourd’hui nous prenons la route de Hell-Bourg, par un temps radieux, pour déjeuner au Ptit Koin Kréol, restaurant visité en 2016. La note avait été bonne, avec des remarques. Nous voulons voir si cet établissement mérite de figurer sur la liste des tables à recommander.

Les lieux n’ont guère changé depuis notre passage. L’antique et typique case créole est accueillante, même si, ici et là, le plancher vermoulu est affligé de tangage, ce qui donne du cachet à l’endroit, et des sueurs aux personnes à l’IMC au-dessus de la moyenne. De jolis tableaux, à la vente, ornent les murs. Un passage devenu urgent aux commodités nous révèle des toilettes endommagées. Il est très rare que nous avons des remarques à faire sur ce point, mais laisser un trône dans cet état fait négligé, et aucune excuse ne saurait être acceptée pour le justifier. Remarque faite à l’intéressé, il est possible que lors de votre passage, tout soit rentré dans l’ordre.

Au menu du jour : gratin de chouchou et salade exotique en entrée. Civet zourite, civet de cerf, espadon combava, porc à la vanille, rougail andouillette, rougail saucisse, cari poulet et poulet massalé. Soit huit caris et deux entrées. Il est important de le signaler pour la suite. Après les rafraîchissements, nous attendons une bonne vingtaine de minutes avant que nos gratins arrivent. Ils sont chauds. La texture est parfaite : moelleuse et non liquide, où le chouchou s’exprime pleinement, en dépit des assauts du fromage. Un gratin délicieux qui nous met en appétit pour la suite.

Nouvelle attente, un peu plus longue cette fois. La clientèle débarque en nombre. L’homme au service est seul. Nous observons ce dernier faire des va-et-vient à toute vitesse entre les cuisines et les tables, intérieures et extérieures, avec un air à casser du petit bois. Finalement les caris débarquent.

Disons le tout net, pour le civet zourite, nous sommes bons clients. Celui-ci ne nous décevra pas, même s’il ne va pas nous faire décoller de notre chaise. La cuisson est très équilibrée : de la mâche souple, juste résistante, mais pas du tout caoutchouteuse, qui donne du plaisir. Les petits morceaux du céphalopode lancent des attaques chaudes et poivrées, teintées du vin cuit, tout en restant un peu en retrait sur leurs saveur propre. C’est certainement du surgelé, on s’y attendait, mais qui se défend plutôt bien. Le plat est nettoyé.

Les andouillettes jouent la même partition moderato, sur une texture plutôt molle. La sauce bien rouge, avec des côtés un peu sucrés, trahit l’utilisation au moins partielle de la tomate en boîte. Cela n’est pas plus dérangeant que ça, gustativement parlant si ce n’est que les andouillettes elles-mêmes font profil bas. Trop dessalées ou défaut d’origine ? Nous les attendions plus éveillées, avec des petits bouts croquants de cartilage. Du piment vert aurait bien secoué cette affaire. Le plat est toutefois mangeable. Nous repoussons nos assiettes vides. En face, un couple, assis depuis un moment, semble perdre patience. Heureusement que leur commande arrive.

Nous demandons des bananes flambées au dessert. Elles ne seront pas flambées devant nous. Pas le temps. Les bananes n’ont pas eu le temps non plus d’attacher à la poêle, ni de prendre de la couleur.

Nous repartons après avoir réglé 68 euros pour trois boissons, deux entrées, trois plats et un dessert. Ou 26 euros pour un très bon gratin, un assez bon cari et deux bananes neurasthéniques. Le rapport qualité prix est perfectible.

La cuisine au Ptit Koin Kreol est relativement correcte, bien que les produits utilisés ne soient pas haut de gamme. Les clients exigeants y trouveront à redire, sans doute, mais le point le plus problématique est le temps d’attente. Evidemment, difficile de faire tourner à deux un restaurant fréquenté en plein Hell-Bourg. Le serveur souhaiterait sans doute avoir le don d’ubiquité.
Si les moyens humains, et financiers, manquent, pourquoi ne pas simplement réduire la voilure ? Est-il d’abord nécessaire de proposer huit caris, sachant qu’ils suivent deux entrées et précèdent quatre desserts, quand il est patent qu’en cuisine, on pédale dans la semoule ? Autant proposer simplement trois caris, comme bon nombre de petits restaurants le font déjà, et réalisés avec de bons produits frais.
Il serait ensuite judicieux de réduire le nombre de tables. Les circonstances sanitaires s’y prêtent déjà, la distanciation physique étant de rigueur, même si en l’état actuel la salle est assez spacieuse. A vouloir contenter tout le monde, on finit par indisposer des gens, qui, à la base, montent jusqu’à Hell-Bourg pour passer un bon moment. Un changement stratégique est donc urgent, et il se pourrait que les responsables du Ti Koin Kréol y songent. En attendant, nous vous recommandons l’adresse, mais si vous voulez déjeuner en paix, allez-y en semaine !