Timides progrès à l’Auberge

Sainte-Anne et Saint-Benoît, sont un vivier de restaurants qui compte quelques bonnes tables. L’on peut citer « le Saint-Benoît », « La Cabane aux Epices », « Il était une fois dans l’Est », « Saveur dan’ Fèy Banane ». Aujourd’hui nous allons faire une mise à jour de critique à l’Auberge Créole. La dernière visite date de 2013, il était temps.

Nous débarquons de bonne heure, comme d’habitude. Pas de souci pour se garer, le parking est grand. La salle aussi, d’autant que peu de tables y sont dressées. Idéal pour les évènements familiaux ou d’entreprise. En effet une très belle terrasse tout en bois a été réalisée, ce qui, outre le fait d’agrandir le restaurant, lui donne un certain cachet, surtout au bord de la mer et près d’une ligne de pinpins typiques de la côte Est et Sud Sauvage. En revanche un certain désordre règne aux alentours de la caisse. Des bacs qui traînent ici, des baskets posées là, à la vue du client. Tout ça n’est pas très présentable.
L’accueil est souriant et avenant. Nous choisissons notre table. Le menu sur ardoise nous est déposé pour le choix. Les seuls plats qui mettent en appétit : un civet de cerf et un poulet palmiste.

Nous demandons à la serveuse si le cerf est local, ayant un doute. « Oui », nous répond-on. Va pour le cerf, plus le poulet à emporter. Aucune entrée n’est proposée, les seules crudités font partie de salades qui sont des plats à part entière. Voilà qui est dommage. Pourquoi ne pas imaginer servir ces mêmes salades en version réduite en guise d’entrée ?
A notre surprise, ce sont des samoussas (au fromage), des nems et bonbons piment qui nous sont servis. Pas mauvais, mais sans doute pas faits maison. Le cerf arrive. A la chasse !
Nous notons d’abord que l’odeur caractéristique de civet est standard, et pas très relevée. L’aspect général ne donne pas envie. Un peu plus persil ciselé, saupoudré avec davantage de soin, une ou deux tomates cerise, auraient suffi à donner au plat quelques couleurs, y compris gustatives. La première bouchée n’est guère engageante, la texture est de papier mâché, presque farineuse sur certains morceaux. La saveur intrinsèque de la viande est au rabais, atomisée par le vin rouge. Tout ça est grossier. Ça, du cerf péi ? Nous reposons la question à un autre serveur qui confirme les origines néo-zélandaises (et donc surgelées) du bestiau. Si on avait su, on aurait pas venu, comme dit l’autre.

Le poulet, lui, vient bien de chez nous. Encore heureux. Il se défend d’ailleurs beaucoup mieux. Rien à dire sur le cari lui-même. Le roussi est bon, les odeurs conformes et les saveurs aussi. Le palmiste, coupé assez gros pour avoir de la mâche, est imbibé de la bonne sauce, laquelle n’est pas claire comme nous avons pu le constater ailleurs à maintes reprises. En revanche la chair est sèche, encore. C’est loin d’être un poulet fermier, ou les poulets fermiers d’aujourd’hui ne sont plus ce qu’ils étaient. Encore moins un poulet « la cour ». On peut comprendre le choix économique d’une volaille rentable mais dans ce cas il faut adapter le plat.

Le riz, quant à lui, n’est pas grandiose mais fait le travail. Les haricots sont bons. Le rougail aussi, même s’il aurait pu être mieux haché que ça. Il faut hélas faire une croix sur le rougail tomate pilé à l’ancienne, qu’on ne retrouve même plus dans les tables d’hôtes. Trop difficile, trop fastidieux, pénurie de pilon ?

Nous demandons si le dessert est fait maison. On nous certifie que oui. La tarte tatin arrive donc après un temps d’attente certain, toute chaude, accompagnée d’une glace au coco. Il aurait été bon de préciser le parfum lors de la prise de commande. Tout le monde n’aime pas le coco. La pâte est fine, l’appareil conséquent, tout ça se déguste avec plaisir, mettant un point final positif à un repas assez moyen.

Nous réglons une addition de 62 euros pour deux plats dont un à emporter, une bière et un dessert. Le rapport qualité-prix est perfectible.


L’Auberge Créole est présente depuis des années à Sainte-Anne. Son emplacement, la configuration des lieux ainsi qu’une carte qui ratisse large (hors menu créole), en fait un acteur de poids du secteur, encore plus depuis son extension en point de vente à emporter « Fins plaisirs » un peu plus loin en direction de Sainte-Rose. Et c’est pas fini, selon nos sources.
Que dire de cette visite ? Même si l’impression générale est meilleure qu’en 2013, nous sommes repartis passablement frustrés. Le nouveau décor est pourtant très engageant, mais la révolution ne se voit pas dans l’assiette créole, pas encore, et pas ce jour là en tout cas. Si l’adoption d’un menu resserré serait une bonne chose, signe de modernité, ce n’est pas juste pour faire « tendance » mais pour privilégier les produits frais et de qualité. Qu’est-ce que c’est que ce cerf venant d’outre océan indien ? En regard de cette qualité là, on pourra trouver tout ça bien cher. Il serait bon aussi de briefer le personnel sur le contenu exact des plats, histoire qu’ils ne racontent pas n’importe quoi aux clients. Au passage, on ne nous a pas proposé d’eau, mais ça devient assez commun. Compte tenu du service flottant et de la qualité hésitante aujourd’hui, il faudra que l’Auberge Créole fasse mieux si elle veut entrer dans le « guide jaune » l’année prochaine. Le décor, c’est bien, mais ce qu’on a dans l’assiette, c’est mieux. Qui trop embrasse mal étreint, surtout avec le recrutement problématique de nos jours.

Allons manger « dan fey banane »

Naguère haut lieu du couscous et du tajine, avant que les gérants plient bagage pour la métropole,
l’ex-« Gazelle de l’Atlas » est devenu « Saveurs dan fey banane » ou la sauce piment a remplacé la
harissa. Et le nom n’a rien d’anecdotique. On mange bel et bien dans une vanne et une fey banane.

Une présentation traditionnelle de plus en plus en vogue, tant et si bien que certains restaurants,
voulant faire « comme si », utilisent une sorte de feuille de papier vert plutôt inesthétique. Il faut en effet pouvoir disposer régulièrement de la matière première fraîche, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Au menu du jour : cari dorade combava, rougail saucisses (de Salazie) et sauté de poulet au soja frais. Nous penchons vers le rougail saucisses. La patronne nous propose quelques samoussas, bonbons piments et piment farci maison. Les samoussas au poulet ou au poisson sont très bon. Une farce hachée finement, où les épices s’expriment pleinement sans avoir besoin d’une assistance pimentée plus que de raison, est emballée dans une pâte un peu épaisse à notre goût et qui aurait pu être plus croustillante, mais qui reste acceptable. Mêmes réserves au sujet des piments farcis au thon, assez bons, avec un gros piment encore croquant.

Le rougail est donc présenté dans la « fey banane » qui le valorise. Les saucisses de Salazie, sans indication de provenance plus précise, sont coupées en trois ou quatre. À l’intérieur, la chair juteuse pré-sente des morceaux assez gros qui donnent de la mâche. L’équilibre des épices et de la texture est appréciable. Pas, de poivre revendicatif, de gras domi-nant, ou de chair trop sèche. C’est de la bonne sau-cisse créole. À Salazie, nous connaissons au moins quatre charcuteries d’où elle pourrait provenir : à Hell-Bourg, Salazie Village, Mare à Vieille Place et Ilet-à-Vidot. Plus jaune que rouge, le rougail dans sa sauce épaisse imbibe le bon riz et se laisse savourer sans grimace. Les haricots sont assez moyens. Un léger manque de sel peut-être. Le riz est plutôt correct. La sauce zoignon, très verte, envoie de la force juste assez pour relever les bouchées sans que celles-ci ne fassent transpirer le mangeur. La vanne est vidée.

La patronne nous propose un gâteau patate avec le café. Le gâteau est à la fois épais et mœlleux, pas trop sucré. Il manque de parfum, mais demeure satisfaisant dans l’ensemble. Nous notons l’effort de présentation. Il faudrait juste une touche acidulée pour relever tout ça, tant esthétiquement que gustativement. Nous réglons l’addition : 24,90 euros pour une boisson, quatre samoussas et un piment farci, un plat, un dessert et un café. Le rapport qualité prix est correct.

« Saveurs dan fey banane », à l’entrée de Sainte-Anne en arrivant de Saint-Benoît, est un petit
restaurant sans prétention, qui bénéficie d’un cadre verdoyant. Les quelques tables présentes sur la
terrasse autorisent la distanciation physique. L’accueil de la patronne est souriant. Cette dernière
assure un service décontracté, qui met à l’aise. Trois plats qui changent quotidiennement, le choix
peut paraître mince, mais après tout, s’ils sont tous aussi bien faits que notre rougail saucisse du jour,
cela sut à contenter le client. Mieux vaut faire peu et bon, que beaucoup et négligé. L’adresse fera
son entrée dans le futur guide des meilleurs restaurants créoles.

Le tangue, par Jofrane Dailly : Accords sucrés-salés pour un civet sublimé

C’est un des plats emblématiques de la tradition culinaire réunionnaise, en dépit du fait qu’il divise : en civet et en cari, on l’adore ou on le déteste. Certains Réunionnais en ont même un a priori négatif sans jamais l’avoir goûté. Et si on en faisait un plat gastronomique ? Jofrane Dailly, du Diana Dea Lodge, a relevé le défi.

L’histoire est née en dégustant un cari tangue traditionnel dans l’un des rares restaurants où l’on peut le trouver : Pépé do Fé, à Saint-Denis. Sandie Banon, son chef, maîtrise le sujet. « Comme toujours, la qualité du produit est importante. Je choisis des tangues chassés en forêt, qui sont censés avoir eu une alimentation variées et naturelle. » Ajoutez à ça l’expertise de Sandie, et l’on obtient des plats où la saveur sauvage si caractéristique du tangue est maîtrisée pour ne pas devenir envahissante.

Mais ces humeurs fortes de gibier, qui ont leurs adeptes, et qui se posent comme une sorte de métaphore gustative de cet esprit rebelle né du marronnage (car ce plat remonte loin), pourraient-elles être domestiquées pour que les palais non-initiés les apprécient, sans pour autant trahir cet ADN typique qui fait la joie des repas en famille et entre amis, dan fey banane, accompagné du traditionnel Charrette ?

Quelques jours avant que le Covid s’abatte sur nous comme la vérole sur le bas clergé, nous avions lancé une idée à priori saugrenue à des chefs de belles tables de l’île : créer un plat avec du tangue en mode gastronomique. Les premiers à répondre furent Jofrane Dailly, Disciple d’Escoffier, le talentueux chef du Diana Dea à Sainte-Anne et le dynamique et non moins génial chef de la Fabrique, le sieur Colson Jehan. Sollicité également : Claude Pothin, du Palm, qui n’a pas eu le temps de nous dire oui ou non, juste avant la chienlit.

Une recette originale, travaillée à basse température

« L’idée me trottait déjà dans la tête depuis un certain temps » avoue Jofrane. Perché depuis une année dans sa cuisine des hauts de Sainte-Anne, le jeune chef, en constante évolution, tend à imprimer à ses plats des couleurs plus locales et plus traditionnelles, par un travail minutieux et une recherche active sur les saveurs qui font de notre cuisine la meilleure de l’océan Indien (Soyons chauvins, que diable). « Ce petit défi m’a décidé à passer à l’action, mais quand j’ai vu les trois tangues arriver, je me suis demandé ce que j’allais faire avec » ajoute-t-il. Ce syndrome de la page blanche, que connaissent bien les écrivains, ne dure pas. L’idée d’un roulé germe très vite, et la version civet s’impose. Pour aller au bout de l’exercice, Jofrane va utiliser notre bon vieux vin de Cilaos, le sucré, pour arranger le Tanrec Ecaudatus, lequel a été proprement désossé au préalable.
« J’ai fait revenir les carcasses comme pour faire un jus de viande classique, avec carottes, oignons, ail, gingembre, girofle. J’ai prévu une petite farce aux pleurotes et champignons de Paris, avec des brèdes pour les roulés. Ces derniers sont cuits à 64°c pendant deux ou trois heures. Les cuisses sont confites dans de l’huile d’olive, de l’ail et du thym pendant deux heures à 60°c. La sauce sucrée-salée est réalisée grâce au vin et au travail sur les carottes, elle est montée au beurre et liée au chocolat, comme pour le lièvre à la royale, mais sans le sang ! »
Jofrane affectionne ce côté sucré-salé qui n’est pas sans rappeler l’apport asiatique dans la cuisine réunionnaise. « Si les clients n’aiment pas, je m’adapte » souligne-t-il, avant de nous narrer ses essais concernant d’autres produits traditionnels, qu’il compte bien servir de façon gastronomique.
Ne comptez pas grimper au Diana Dea pour manger ce civet de tangue spécial, il n’est pas à la carte. Ceci constituait un « one-shot » comme disent les rosbifs. Il est délicat pour les établissements hôteliers et les restaurants de proposer à l’année des produits dont la traçabilité n’est pas dument prouvée par des fournisseurs versant taxes et impôts à l’administration. Des règles qui devraient s’assouplir si l’on veut que la richesse de notre cuisine traditionnelle perdure, avec l’apport de notre si magnifique terroir.

Un voyage au cœur de l’Est

Pour ce repas, où le tangue était le point d’orgue, Jofrane Dailly a travaillé une ambiance très « terroir », où la nature réunionnaise est mise à l’honneur.
Pour réveiller nos papilles, une chips de songe et houmous au cumin présentés sur un lit de galets. Les papilles sont réveillées, les sinus aussi. La chips laisse sa saveur sur les dents tandis que le houmous velouté nous rappelle les délicatesses malbars de notre tradition culinaire.
Suit du caviar rova sur un jaune d’œuf mollet, avec une crème de wasabi et une émulsion d’eau de mer. Une lichette d’émulsion sur le caviar d’abord, pour la mer, puis l’œuf ajusté d’une claque de wasabi, pour la terre. Voilà une équation singulière qui introduit le Tilapia  « Gueule Rouge » de Daniel du Piton Armand (l’éminence verte juste en face de l’hôtel), sa sauce crustacé façon cari et son risotto de chouchous de Salazie au cumin. Le poisson, réveillé par la sauce, fond dans la bouche et ne fait pas dans le détail pour vous arranger le palais. C’est puissant, avec une envolée piquante, et les « ti-brèdes » sautées, sucrée-salées viennent obligeamment jouer les négociatrices, assistées des chouchous.
Ce coup de vent gustatif ébouriffant n’est que le prélude à l’arrivée du roi Tango.
Nous y sommes. Le dressage est raccord avec les prétentions gastronomiques. Première bouchée. La viande est délicate, tendre, et se pare des atours gras de sa condition mais sans exagération, juste de quoi la faire glisser sur les molaires. Puis, le plaisir. Celui de retrouver cette saveur sauvage, musquée, déferlant comme une vague, mais sans tsunami. Cela renifle le cul de marmite à la braise, le bois de couleur mouillé au petit matin dans les forêts, laissant sur le mordant d’un bout de peau comme des notes de graton.
La sauce sucrée-salée fait danser le tangue, et les petites fines herbes lui ajoutent un éclat campagnard plus léger. Les patates et la farce de champignons et de brèdes se fondent dans le décor. Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître. Le plat relève parfaitement le défi proposé en conservant le goût authentique du civet de tangue, tout en lui apportant une touche asiatique originale et tout à fait seyante. Il ne manque qu’un petit rhum Charrette, pour la tradition, ou un vin tannique, qui fait des nœuds dans la luette.
Un dessert de gâteau patate au chocolat et au café Bourbon pointu clôt ce repas avec élégance.

Un meilleur accueil et encore plus de confort

Le Diana Dea Lodge bénéficie actuellement de quelques menus travaux afin d’améliorer l’accueil et le confort au niveau de la piscine et du bar, avec le projet de création d’une cave à vins digne de ce nom. L’établissement, dont la réputation n’est plus à faire, passé en mode room service pendant le confinement, voit ses activités repartir de plus belle depuis le 15 mai. « Nous étions complets pour la fête des mères. Nous avons du monde les week-ends. » se réjouit Jofrane Dailly. Un succès qui n’est que la conséquence logique de prestations dignes des plus beaux établissements internationaux, dans un cadre superbe où l’on se confinerait toute l’année !

L’Auberge créole

[Visite en avril 2013]

Quelques semaines après notre passage à Sainte-Anne, aux Trois orangers, vous voici de retour dans ce quartier de Saint-Benoît, à l’église fameuse et repeinte, mais empestant hélas la moisissure à rendre malade les allergiques (Mais que font les responsables de cet édifice ?) Nous ne nourrirons donc pas nos âmes ici, aujourd’hui, mais il n’en ira pas de même pour notre corps, qui, midi tapante, réclame sa pitance. Justement, presque en face il y a l’Auberge Créole, au fond d’une allée. L’endroit, pittoresque, donne sur la grande plage de galets. Le bâtiment semble avoir bénéficié de quelques rénovations et aménagements, mais il reste beaucoup à faire pour rendre l’endroit accueillant.

Nous sommes accueillis par un personnel souriant et sympathique, et nous nous installons à une table non loin de la baie vitrée qui donne sur une grande terrasse en caillebotis ouvrant elle-même sur le rivage. Nous y respirons l’air marin à plein nez, avec ses embruns consécutifs à une mer agitée. Des embruns qui n’épargnent pas les baies vitrées d’ailleurs : elles sont sales. Les chaises aussi ont subi les assauts salins : les pieds en fer sont attaqués par la rouille. Pas top. Un remplacement du mobilier ne serait pas du luxe. La salle est taillée pour les réceptions, mais ce midi une trentaine de couverts attend les clients.

Une jeune demoiselle fort accorte nous emmène la carte. Grosse carte (ce qui n’est pas forcément un bon signe). Zoreil, créole, chinois, et des pizzas: on sait tout faire à l’auberge créole, qui devient du coup l’auberge internationale ! Nous faisons notre choix en sirotant un excellent punch coco maison, « préparé avec amour », nous fait le serveur, qui nous détaillera la composition de l’affaire. Nous notons à notre surprise grande que la demoiselle sus citée prend la peine de nous remplir les verres. Ça c’est du service ! Nombreuses sont les fois où on nous a juste déposé les canettes sur la table, sans même les ouvrir !

En entrée, nous testerons du foie de volaille poêlé et un gratin de chouchou, que suivront un cari canard fumé et un cari poulet palmiste.

Et ça commence pas trop mal. Le gratin est passable, avec des morceaux de chouchous assez fermes sous la dent, et dont la saveur délicate n’a pas été écrasée par le fromage fondu. La béchamel a été dosée à l’économie, mais ce n’est pas désagréable et le plat ne s’en trouve que plus léger.

Le foie de volaille assure aussi, avec son petit arrière-goût de vinaigre, dans son lit de salade à l’assaisonnement raisonnable en sel (un miracle!). Idéal pour préparer nos papilles à l’arrivée du canard fumé. Les entrées sont prometteuses. Mais après…

Après nous avons droit à deux caris plutôt réussis, dans l’absolu, mais pour le moins standards. Le poulet palmistes nous en met pourtant plein les sinus, dans sa sauce convenablement épicée, mais qui s’avère assez grasse par ailleurs. La viande pour sa part est sèche, même les morceaux « de choix » comme la cuisse, et ne nous procure aucun plaisir. Les larges tranches de palmistes ont bu le fond de sauce et sont goûteuses mais en revanche filandreuses. Même affaire pour le canard fumé, dont, a priori, on pardonne plus volontiers le côté gras : Le cari canard n’a pas pour réputation d’être un plat léger. La viande, là aussi, est assez sèche et le côté « fumé » est un peu en berne. Ce qui est fort dommage.

Les deux plats nous laissent assez dubitatifs. Si la préparation des caris, le dosage des épices, la couleur de la viande et l’odeur de roussi nous semblent conformes aux canons de la cuisine créole authentique, l’ensemble au final n’est pas à la hauteur de nos espérances. C’est un peu éteint. Est-ce la qualité des volatiles, qui n’ont certes pas dû être trucidés de la veille, ou alors l’huile utilisée ? Toujours est-il que les caris nous resteront sur l’estomac jusqu’au lendemain, lourds comme des enclumes.

Le riz s’avère être peu ou prou le même que celui dont nous a affligé l’Ambéric il y a quinze jours, à la différence près qu’il est ici mieux cuit et sans odeur de vieux ! Côté accompagnement : les lentilles baignent un peu dans la flotte, en compagnie de quelques haricots ; le rougail tomate est quant à lui très satisfaisant, dans le taux de sel comme dans le dosage du piment.

De l’ananas frais sera notre dessert, bien sucré et parfumé comme il sied à notre Victoria.

Addition : 72 euros et des embruns pour deux personnes, en tout et pour tout, avec un café, soit 36 euros par tête de yab. Et la note de rejoindre le canard sur l’estomac !

L’Auberge créole, ou internationale, bénéficie d’un emplacement en or, pour le moment pas exploité à fond, mais cela est certainement dans les projets des responsables. Vous y trouverez un accueil chaleureux, un service plus que correct et une salle en partie de bois habillée s’ouvrant sur l’océan, idéal pour les mariages, baptêmes, et autres réjouissances familiales saisonnières. Pour ce qui est de la qualité de sa cuisine, l’Auberge créole est dans la moyenne, et nous avons longtemps hésité sur la note finale. Nous avons quand même été un peu déçus par la tournure des plats de résistance. Nonobstant la lourdeur relative des caris, imputable peut-être aux viandes et à la qualité de l’huile utilisée (si nous pouvons nous permettre d’oser quelques conjectures) l’ensemble manquait de « punch », comme des plats ayant perdu leur saveur au congélateur et au micro-onde. Nous n’avons donc d’autre choix, pour le moment, que d’attribuer à l’Auberge Créole une fourchette en inox, même si l’argent n’est en définitive pas très loin.

 
Pour résumer :
Accueil : très bien • Cadre : perfectible • Présentation des plats : moyen
Service : très bien • Qualité des plats : moyen
Impression globale : moyen

Fourchette en inox